Méditerranée : Les royaumes goths d'Espagne
Mais les académies, fondées sur un enseignement non chrétien, furent fermées – telle la fameuse académie d’Athènes, fermée par justinien, au vi siècle. Des traditions païennes furent adaptées et intégrées à la chrétienté naissante. Le culte des saints remplaça celui des divinités locales et Athéna Parthénos s’effaça dans beaucoup de temples devant la Vierge Marie, notamment à l’Acropole d’Athènes. Cette aptitude de L’Église à se prêter aux compromis pour faire de nouveaux adeptes lui conféra un avantage décisif sur le judaïsme – qui resta jusqu’au ve siècle une religion fondée sur le prosélytisme – et ce scénario se répéta ailleurs, plus tard : au Mexique, au XVIe siècle, ou au Japon, au XVIIe siècle.
La chrétienté des premiers siècles montra en outre une surprenante disposition à la division : le concile de Nicée, en 325, présidé par Constantin, qui ne s’était pas encore converti, valida une théologie complexe de la Trinité qui ne fut pas acceptée par tous les chrétiens. Byzance dut combattre les groupes dissidents, notamment les monophysites, persécutés au VI siècle, mais devenus très puissants en Egypte au sein de l’Église copte. La plupart des peuples barbares qui envahirent l’Europe occidentale embrassèrent l’arianisme, à l’exception des Francs qui, sous la conduite de Clovis, devinrent catholiques aux environs de l’an 500. À cette époque, les Églises de Rome et de Constantinople avaient définitivement rompu leurs liens, du fait des tensions entre les papes de Rome et la cour de Constantinople. De plus, l’usage du latin, institué en Occident, séparait l’obédience romaine des Églises d’Orient qui, pour la plupart, conservaient le grec.
La Méditerranée de la fin de l’Antiquité fut le champ de bataille où s’affrontèrent les confessions abrahamiques. Le judaïsme avait un grand nombre d’adeptes dans le sud de l’Italie et en Afrique du Nord, et dans beaucoup de régions les juifs parlaient grec. En 400, l’élite de Minorque était constituée par les familles juives de Magona (la moderne Mao). Deux siècles et demi plus tard, les juifs berbères régnaient apparemment en maîtres sur des terres que l’Empire byzantin n’avait pas soumises – beaucoup étaient les descendants de païens. Ces succès du judaïsme s’étaient produits en dépit d’une législation impériale de plus en plus sévère, qui visait à interdire aux juifs les postes les mettant en situation de commander à des chrétiens, et empêchant la construction de nouvelles synagogues.
Une attitude recommandée dans les écrits d’Augustin d’Hippone – saint Augustin – au ve siècle. Le célèbre théologien soutint que les juifs avaient le droit de vivre en pays chrétien, mais sous un statut inférieur, en tant que gardiens du texte original de l’Ancien Testament, qu’ils n’avaient pas su interpréter comme une preuve de la vérité chrétienne. Les rois wisigoths d’Espagne, convertis au catholicisme en 589, après avoir adopté l’arianisme en 341, initièrent des persécutions contre les juifs, considérés, au même titre que les païens, comme des exceptions à la norme chrétienne. Mais ces persécutions restèrent elles-mêmes une exception et les juifs purent souvent continuer à vivre paisiblement comme fermiers, artisans ou commerçants.
La troisième religion qui transforma la mer Intérieure fut l’islam, apparu non loin de la mer Rouge au début du viie siècle. Pendant des siècles, elle se tourna à la fois vers la Perse, en Orient, et vers la Méditerranée, en Occident. Son appel s’adressa d’abord aux juifs et aux païens de la péninsule Arabique. Ses premiers adeptes, à l’origine de son expansion, furent des Arabes convaincus qu’Allah leur avait confié la mission de diriger le monde – sans nécessairement le convertir, au moins dans un premier temps. Mais l’islam partageait beaucoup d’attitudes et de préoccupations avec le judaïsme et la chrétienté. Son insistance sur l’absolue unicité de Dieu était un trait central du judaïsme. Comme ce dernier, il dotait ses adeptes d’un ensemble de règles touchant tous les aspects de leur vie quotidienne, y compris leur régime alimentaire. Dans le même temps, l’islam tenait Jésus et Marie en grand honneur, et considérait les juifs et les chrétiens comme des fidèles égarés du même Dieu, Allah, plutôt que comme des déviants définitifs.
Ces dispositions contribuèrent à convaincre des chrétiens rebelles de le rejoindre. notamment quand les armées arabes se lancèrent à la conquête de la Syrie et du Liban, où l’on trouvait beaucoup de monophysites. « Islam » signifie « soumission ». Celle-ci adopte deux formes : sur le plan politique, elle est soumission à autorité des califes ; sur le plan religieux, à la religion prêchée par Mahomet. L’islam s’accorda plus difficilement avec les nouveaux musulmans, non arabes, désignés comme mawali, les « clients », qu’avec les juifs et les chrétiens, qui acceptaient l’autorité politique des conquérants. Mais ses conquêtes privèrent l’Empire romain du grenier à blé égyptien et de riches cités en Syrie et en Afrique du Nord. Ces pertes, en retour, renforcèrent l’orientation grecque orthodoxe de l’Empire byzantin.
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