L'étymologie et l'évolution des langues
Baudelaire dit quelque part qu’il « n’y a rien de plus intéressant que la religion ». Il a raison mais seulement de manière partielle car dans sa formule il oublie l’étymologie. Tous les professeurs de langues (que leur matière soit le français, le latin ou le grec) l’affirment : dès qu’on parle d’étymologie et qu’on explique quelques curiosités aux élèves, la classe se tait et les regards s’illuminent. Connaître l’étymologie, c’est non seulement participer à l’histoire des mots mais c’est aussi, en quelque sorte, leur arracher des secrets parfois bien cachés. C’est sans doute cela qui plaît aussi aux jeunes.
On notera, ici, que contrairement aux mots latins qui ont beaucoup évolué en passant dans la langue française (ils sont passés à la moulinette déformante de l’évolution phonétique), les mots grecs (mots savants pour la plupart) ont peu évolué et il est donc beaucoup plus facile de reconnaître d’un premier coup d’œil leur étymologie, d’où une gratification immédiate, laquelle plaît nécessairement à tous les débutants.
L’étymologie est la science qui a pour but de rechercher l’origine des mots en suivant étape par étape leur évolution jusqu’à l’état le plus anciennement attesté ou supposé (si on souhaite remonter à l’indo-européen). Notre but dans cet ouvrage est bien plus modeste. Il s’agit simplement de fournir au lecteur une sélection des racines grecques les plus utilisées de manière à lui permettre de comprendre immédiatement un nombre important de mots de la langue française usuelle ou savante. C’est donc, en quelque sorte, le chemin inverse de celui de l’évolution : au lieu de s’intéresser à l’évolution d’un mot, nous nous bornons à dresser des listes de racines grecques en précisant leur état dans le langage actuel. Fort heureusement, contrairement aux racines et aux mots latins qui ont subi une véritable évolution (les mots actuels étant parfois fort éloignés de leur racine), les racines grecques ont fort peu évolué et dans le mot français moderne il est relativement facile de retrouver la racine grecque d’origine.
Avant de nous intéresser directement à ces racines, il paraît utile de donner à nos lecteurs qui ne sont pas spécialistes en linguistique quelques informations sur l’évolution naturelle des langues. Étant donné qu’il ne s’agit pas du sujet de cet ouvrage, ce chapitre sera très bref mais nous invitons les lecteurs qui seraient intéressés par ce sujet à se reporter à la bibliographie en fin de volume, laquelle signale quelques ouvrages accessibles sur les différents sujets évoqués .Baudelaire